Samedi 18 novembre 2017, Charlotte Leblanc a présenté à la SALSA, une conférence sur le thème : “un grand projet des années 1930 pour la valorisation du bois : Port-sur-Saône comme ville modèle”.
Charlotte Leblanc est chargée de la protection des monuments historiques à la Conservation régionale des monuments historiques, DRAC de Bourgogne – Franche-Comté.
Charlotte Leblanc une partie du public
En 1936, la ville de Port-sur-Saône ne compte que 1 667 habitants. Elle joue cependant déjà un rôle de pôle touristique et nautique en bord de Saône, et a fait l’objet, dès 1930, d’un nouveau plan d’urbanisme.
Le personnage clé de l’élévation à Port-sur-Saône de plusieurs bâtiments en bois va être André Liautey (1896 – 1972) qui sera conseiller général, député de la Haute-Saône de 1932 à 1940 (groupe radical-socialiste), puis de 1951 à 1955 et maire de Port. Mais il aura aussi des fonctions nationales et gouvernementales : il est sous-secrétaire d’État à l’Agriculture de juin 1936 (gouvernement Blum) à avril 1938.
Dès les années 1930, la filière bois est en crise (diminution de la part du bois dans l’ameublement, dans la construction, avec la concurrence du fer et du béton, et même dans le chauffage). André Liautey a défendu la forêt française contre l’importation de bois étrangers, il a créé des parcours régionaux de promenades en forêts, des guides touristiques pour pratiquer la randonnée en milieu forestier. Parallèlement, en Europe, se développe l’idée de construire des maisons en bois.
C’est alors que survient l’Exposition Universelle de 1937, organisée à Paris sur le Champ de Mars et en bordure de Seine. On se souvient de la présence des pavillons étrangers, mais il se trouvait également un espace français où étaient présentés des bâtiments témoins d’une architecture régionale moderne (et non pas traditionnelle). Le bois était bien mis en valeur, ne serait-ce que par la porte de l’Alma et ses deux tours gigantesques.
La Franche-Comté y avait un pavillon commun avec la Bourgogne et les Pays de l’Ain, mais avait réclamé et obtenu un bâtiment spécifique, le « pavillon des Gaudes », érigé à part, quai de Passy, de l’autre côté de la Seine. En bois, avec un clocher de type comtois « à l’impériale », il a été remonté à l’École du Bois de Mouchard après l’exposition.
« L’auberge de la Jeunesse », réalisée entièrement en bois, notamment en sapin ignifugé, était aussi à l’exposition de 1937 ; elle fut démontée puis transportée par péniche jusqu’à Port-sur-Saône et remontée en janvier 1938, comme c’était prévu.
L’École de Saint-Valère (rive droite de la Saône en face de Port-sur-Saône) a été construite sur place en 1937 – 1938 en utilisant des essences locales, du Jura et du Doubs, financée par les ministères de l’Éducation Nationale et de l’Agriculture. Très typique avec son faux clocher et son horloge en bois, elle était chauffée… au bois. Elle est toujours en service.
Le « Bâtiment Jobelot », ancien centre d’apprentissage des métiers du bois fut école départementale du bois et des carburants forestiers (gazogènes), construit en ville de Port.
La « Maison Forestière » a été érigée près de la plage de Port-sur-Saône (détruite par un incendie).
En annexe, Charlotte Leblanc a rappelé l’existence de trois constructions en bois régionales :
- le « Petit Lycée », annexe actuellement inutilisée du Collège Gérôme de Vesoul, construite à la demande d’André Liautey ;
- l’école en bois de Ronchamp, commandée par la municipalité dirigée par Ludovic-Oscar Frossard, actuellement en réfection ;
- l’église de Lavancia-Épercy (Jura), montée pour l’exposition du bois à Lyon, reconstruite par ses concepteurs en 1951, sous l’influence d’Edgar Faure, alors élu régional et ministre…
- Après de nombreuses questions-réponses, public et conférencière se sont séparés à regret à l’issue de cette très intéressante et originale causerie.
L‘auberge de jeunesse le pavillon des Gaudes remonté à l’École du Bois de Mouchard
Au début des années 1930, la filière du bois français fait face à une crise importante. Le sous-secrétaire d’État à l’Agriculture et député de la Haute-Saône André Liautey (natif de Port-sur-Saône en 1896-1972), qui a spécialement dans ses attributions le service de la direction générale des Eaux et Forêts, met en place une active politique de promotion de la forêt française. Parmi les grands axes de sa politique, il souhaite encourager la construction en bois. S’appuyant sur les études du laboratoire de recherche de l’Institut national du bois et du service de l’architecture du sous-secrétariat à l’Agriculture, il lance des projets de plusieurs constructions en bois pour l’Exposition internationale de Paris de 1937 et la commune de Port-sur-Saône où son père, Paul Liautey, est maire. L’Auberge de la Jeunesse, l’École Saint-Valère, l’École départementale du bois et des carburants forestiers sont autant d’expérimentations architecturales faisant de Port-sur-Saône une ville modèle pour une nouvelle manière de construire. Le matériau est au cœur d’une vision régionaliste de l’architecture franc-comtoise.
Les bâtiments en bois de Port-sur-Saône :
Les quatre bâtiments emblématiques de cette période : l’auberge de jeunesse et les premiers arrivants en juillet 1939, juste avant la Seconde Guerre mondiale, le centre d’apprentissage, le chalet de la Plage et l’église Saint-Valère. Cette dernière fut inaugurée le 25 septembre 1938 par André Liautey, à l’époque (1936-1938) sous-secrétaire d’État à l’Agriculture du gouvernement Blum, appelé “le ministre de la Forêt”, mais aussi maire de Port-sur-Saône, sénateur puis député de la Haute-Saône.
C’est à l’issue de l’exposition universelle de Paris en 1937, axée sur les ressources de la forêt, qu’André Liautey fait “récupérer” les stands démontés pour les transplanter, sur péniches, à Port-sur-Saône, sa ville natale.
Il fera installer une station de gazogène, derrière la mairie, où sera formée une génération de mécaniciens spécialisés.
Il fera aussi venir, durant cette période, son ami Albert Decaris, qui va peindre le tout nouveau hall de la mairie de Vesoul.